Le shadow banning, est une pratique opaque par laquelle une plateforme diminue la visibilité d'un utilisateur à son insu, ayant pour effet de réduire le reach et l'engagement de cet utilisateur. Le but du shadow banning est de freiner la diffusion de contenus susceptibles d'enfreindre les règles d'une plateforme sans prendre de mesures directes à l'encontre de l'utilisateur : c'est une censure silencieuse. Cette pratique jusqu'alors non régulée est adressée par une nouvelle réglementation qui va changer un certain nombre de choses pour les plateformes ainsi que pour les utilisateurs.
Le shadow banning est utilisé par les plateformes numériques comme moyen de modérer le contenu sans recourir à des mesures de censures expresses, telles que la suppression de contenu ou la suspension de compte. Si les plateformes ont publiquement nié la pratique du shadow banning, elles ont toutefois reconnu que leurs algorithmes ont une incidence sur le choix des contenus à traiter en priorité. En 2018, Mark Zuckerberg disait que "les techniques de réduction de la visibilité aideraient les plateformes à gérer la désinformation sans devenir des "arbitres de la vérité": préférer une censure silencieuse à une censure publique (1). Cette pratique, bien que controversée, est restée largement non réglementée, laissant aux plateformes la discrétion de son application et peu de recours pour les utilisateurs affectés.
Exemple de shadow banning sur LinkedIn : un utilisateur qui envoie un trop grand nombre de messages à des personnes qui ne sont pas abonnées à son compte, qui tague trop de personnes dans ses postes, qui relaye beaucoup de fausses informations ou que l'algorithme soupçonne d'automatiser ses actions constatera sans doute une baisse du reach et de l'engagement de ses posts.
Le règlement européen "Digital Services Act" (DSA) qui est entré en vigueur dès août 2023 pour les plus grosses plateformes et entrera en vigueur le 17 février 2024 pour les autres plateformes marque un tournant significatif dans la régulation des services numériques. Ce règlement introduit des obligations de transparence et de responsabilité pour les plateformes en ce qui concerne la modération du contenu. En ce qui concerne le shadow banning, les articles clés du DSA à considérer sont :
Le DSA impose aux plateformes numériques une obligation de transparence et de justification de leurs pratiques de modération, y compris de shadow banning. Cela signifie que :
Le Digital Services Act représente un changement significatif dans la régulation des plateformes numériques, offrant un cadre légal pour contester la pratique du shadow banning. Tant pour les utilisateurs que pour les plateformes, il est crucial de comprendre ces nouvelles obligations légales et de s'adapter à un environnement numérique plus transparent et responsable.
(1) Mark Zuckerberg, 2018 à propos du Shadow Banning, The Recode Interview.